Municipales : préparer les tout premiers pas des nouveaux élus

Par Jean-Charles Savignac

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Chronologiquement, le mandat des conseillers municipaux débute avec la proclamation des résultats le soir même du premier ou, si besoin, du second tour de l’élection. Mais, au-delà de plusieurs formalités à accomplir individuellement, il faut s’arrêter sur la dimension collective de la mise en place des instances communales, en fixant les principaux repères relatifs à l’organisation et au fonctionnement du nouveau conseil municipal.

Après l’élection, la première réunion du conseil municipal constitue une étape déterminante de la vie communale.

Pour les juristes, le Code général des collectivités territoriales (CGCT) prend logiquement le pas sur le Code électoral.

1. Organisation du nouveau Conseil municipal

La première réunion se tient de plein droit au plus tôt le vendredi matin et au plus tard le dimanche qui suit le jour du scrutin à l’issue duquel le conseil a été élu au complet. Elle est d’abord consacrée à l’élection du maire et des adjoints (CGCT, art. L. 2121-7).

C’est le maire sortant, même s’il n’est pas réélu conseiller municipal, qui convoque cette première réunion, ou à défaut l’adjoint dans l’ordre des nominations, ou à défaut le conseiller le plus ancien dans l’ordre du tableau. Si le maire sortant refusait ou omettait de convoquer les nouveaux conseillers, le préfet, après l’en avoir requis, y procèderait d’office lui-même ou par un délégué spécial (CGCT, art. L. 2122-34).

Les articles L. 2121-11 et L. 2121-12 du CGCT fixent le délai entre l’envoi de la convocation et la réunion du conseil municipal, délai qui varie selon la population de la commune. La convocation doit préciser l’ordre du jour et indiquer, pour la première réunion du conseil municipal, qu’il sera procédé à l’élection du maire et des adjoints (CGCT, art. L. 2122-8).

1.1. Public et quorum

Les séances du conseil municipal étant publiques (CGCT, art. L. 2121-18), la première réunion ne fait pas exception. Le maire et les adjoints sont donc élus en séance publique. Mais il peut être procédé à huis clos sur décision du conseil municipal qui, à tout moment, sur la demande de trois conseillers municipaux, et après vote à la majorité absolue des membres présents ou représentés, sans débat, peut décider de se réunir à huis clos pour élire le maire.

L’élection du maire et des adjoints ne peut avoir lieu que si le conseil municipal doit être au complet au moment de sa convocation (CGCT, art. L. 2122-8), c’est-à-dire que tous les sièges du conseil doivent avoir été pourvus. Peu importe ensuite s’il manque un conseiller le jour de l’élection du maire, il suffit que le quorum soit atteint. Si le conseil municipal se trouvait incomplet parce que le scrutin du second tour a porté sur moins de conseillers qu’il n’y en avait à élire, cette assemblée ne peut procéder valablement à la constitution de la municipalité. Des élections complémentaires sont nécessaires.

1.2. Élection du maire

Pour cette séquence, la séance est présidée par le plus âgé des membres du conseil municipal en exercice, présents à l’ouverture. La majorité des membres en exercice doit assister à la séance (simple présence à l’ouverture de la séance, c’est-à-dire au moment où le doyen d’âge prend la présidence pour faire procéder à l’élection ; le départ de conseillers avant l’ouverture du scrutin n’affecte pas l’élection, bien que le quorum ne soit plus atteint, dès lors qu’il a été respecté au début de la séance). Après deux convocations successives, à trois jours au moins d’intervalle, l’élection est valable, quel que soit le nombre des présents.

Le maire est élu au scrutin secret (le vote par procuration étant admis). Il n’y a pas d’obligation de déclaration de candidature. Peut être élu maire un conseiller municipal qui ne s’est pas porté candidat à la fonction. A fortiori, un conseiller peut se porter candidat à un tour de scrutin alors qu’il ne l’était pas aux tours précédents. Si, après deux tours de scrutin, aucun candidat n’a obtenu la majorité absolue, il est procédé à un troisième tour de scrutin et l’élection a lieu à la majorité relative. Au cas d’égalité des voix, le plus âgé est déclaré élu.

Le scrutin est uninominal. La majorité absolue, au premier comme au deuxième tour de scrutin, est calculée, selon la jurisprudence, non par rapport au nombre des conseillers municipaux en exercice ou prenant part au vote, mais par rapport au nombre des suffrages exprimés, après déduction des bulletins blancs ou nuls (CE, 10 déc. 2001, no 235027, Élections du maire de Santeau).

À noter que lorsqu'une vacance du maire ou des adjoints intervient après le 1er janvier de l'année qui précède le renouvellement général des conseils municipaux, il n'est procédé aux élections nécessaires avant l'élection du maire ou des adjoints que si le conseil municipal a perdu le tiers ou plus de ses membres ou s'il compte moins de quatre membres.

1.3. Élection des adjoints

Aussitôt après l’élection du maire, le conseil municipal, sous la présidence du maire nouvellement élu, fixe par délibération le nombre des adjoints puis procède à leur élection. Le conseil municipal détermine librement le nombre des adjoints sans que celui-ci puisse excéder 30 % de l’effectif légal de l’assemblée. Dans l’hypothèse où l’application de ce pourcentage donne un nombre décimal, le nombre maximal d’adjoints à retenir est celui correspondant à l’entier inférieur (Rép. min., no 25246 : JO AN, 7 févr. 1983, p. 706).

Les adjoints prennent rang selon l’ordre de leur élection et, entre adjoints élus sur la même liste (dans les communes de 1 000 habitants et plus, les adjoints sont élus au scrutin de liste), par l’ordre de présentation sur la liste que le conseil municipal ne peut pas modifier. Lorsqu’un poste d’adjoint devient vacant, les adjoints qui venaient après lui dans l’ordre du tableau remontent d’un cran (le deuxième devient le premier et ainsi de suite), sauf si le conseil municipal décide que le nouvel adjoint occupera dans l’ordre du tableau le même rang que l’élu qu’il remplace (CGCT, art. L. 2122-10).

Cette dernière possibilité a pour objectif de ne pas déstabiliser les conseils municipaux par modification de l’ordre du tableau, qui correspond généralement aux équilibres politiques lors de l’installation du conseil municipal.

Quand il y a lieu, pour quelque cause que ce soit, à une nouvelle élection du maire (ex. : pour cause de démission ou de décès), il est procédé à une nouvelle élection des adjoints. Cette règle, en liant le sort des adjoints à celui du maire, évite à un nouveau maire de conserver les adjoints élus au cours du mandat de son prédécesseur.

1.4. Adjoint spécial

Plusieurs cas de création sont prévus par le Code général des collectivités territoriales :

  • lorsqu’un obstacle quelconque ou l’éloignement rend difficiles, dangereuses ou momentanément impossibles les communications entre le chef-lieu et une fraction de la commune ;
  • en cas de fusion de communes.

Un conseiller élu maire ou adjoint peut toujours décliner la fonction qui lui a été conférée, si la renonciation du conseiller proclamé élu est effectuée avant que la séance ne soit levée, il peut être procédé immédiatement à la nouvelle élection. En revanche, si l’élu manifeste son refus après la clôture de la séance, le conseil municipal doit de nouveau être convoqué dans le respect des formalités prévues.

1.5. Tableau du conseil municipal

Ce document — important pour la suite de la vie locale — détermine le rang des membres du conseil municipal. La préséance au sein du conseil municipal est la suivante : le maire, puis les adjoints, enfin les conseillers municipaux. S’agissant des adjoints, ceux-ci prennent rang selon l’ordre de leur élection, et entre adjoints élus sur une même liste, selon l’ordre de présentation sur la liste (sauf cas d’élection d’un nouvel adjoint prenant rang de l’ancien). Pour les conseillers municipaux, l’ordre est déterminé par l’application de trois critères :

  • l’ancienneté de leur élection, depuis le renouvellement intégral du conseil municipal ;
  • entre conseillers élus le même jour, le nombre de suffrages obtenus ;
  • à égalité de voix, la priorité d’âge.

Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les conseillers municipaux proclamés élus au premier tour prennent rang avant ceux élus au second tour. Dans les communes de plus de 1 000 habitants, tous les candidats étant élus le même jour au scrutin de liste, l’ordre du tableau est déterminé par le nombre de suffrages obtenus par chaque liste et à l’intérieur des listes par la priorité d’âge.

2. Fonctionnement du Conseil municipal

Les premières semaines du mandat permettent de fixer plusieurs règles essentielles quant à la méthode de travail du conseil municipal et plus largement pour le bon fonctionnement d’instances communales particulières.

2.1. « La Charte de l’élu local »

Elle mérite d’être placée en tête des repères qui suivent, car elle en est un des fondements. Le CGCT rappelle que « Lors de la première réunion du conseil municipal, immédiatement après l'élection du maire et des adjoints, le maire donne lecture de la charte de l'élu local prévue à l'article L. 1111-1-1. Le maire remet aux conseillers municipaux une copie de la charte de l'élu local et du chapitre III du présent titre ». Ce chapitre intitulé « Conditions d'exercice des mandats municipaux » reprend différents thèmes : les garanties accordées aux titulaires de mandats municipaux ; droit à la formation ; indemnités des titulaires de mandats municipaux ; protection sociale ; responsabilité des communes en cas d'accident ; responsabilité et protection des élus.

Charte de l'élu local

1. L'élu local exerce ses fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité.

2. Dans l'exercice de son mandat, l'élu local poursuit le seul intérêt général, à l'exclusion de tout intérêt qui lui soit personnel, directement ou indirectement, ou de tout autre intérêt particulier.

3. L'élu local veille à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d'intérêts. Lorsque ses intérêts personnels sont en cause dans les affaires soumises à l'organe délibérant dont il est membre, l'élu local s'engage à les faire connaître avant le débat et le vote.

4. L'élu local s'engage à ne pas utiliser les ressources et les moyens mis à sa disposition pour l'exercice de son mandat ou de ses fonctions à d'autres fins.

5. Dans l'exercice de ses fonctions, l'élu local s'abstient de prendre des mesures lui accordant un avantage personnel ou professionnel futur après la cessation de son mandat et de ses fonctions.

6. L'élu local participe avec assiduité aux réunions de l'organe délibérant et des instances au sein desquelles il a été désigné.

7. Issu du suffrage universel, l'élu local est et reste responsable de ses actes pour la durée de son mandat devant l'ensemble des citoyens de la collectivité territoriale, à qui il rend compte des actes et décisions pris dans le cadre de ses fonctions.

2.2. Le règlement intérieur

Le règlement intérieur du conseil municipal constitue la règle du jeu pour les six années de mandat des élus.

Facultatif pour les autres communes, il existe dans les communes de 1 000 habitants et plus ; le conseil l’adopte dans les six mois qui suivent son installation (CGCT, art. L. 2121-8).

2.3. Les commissions municipales

Le conseil municipal peut former librement des commissions, composées exclusivement d’élus, pour étudier les questions soumises au conseil. Ces commissions sont des organes d’instruction et ne peuvent se substituer au conseil municipal pour régler les affaires de la commune. Elles peuvent être formées, modifiées ou supprimées au cours de chaque séance du conseil municipal.

Dans les communes de plus de 1 000 habitants, la composition des différentes commissions, y compris les commissions d’appel d’offres et des bureaux d’adjudication, doit respecter le principe de la représentation proportionnelle pour permettre l’expression pluraliste des élus au sein de l’assemblée communale.

Le maire est le président de droit des commissions (CGCT, art. L. 2121-22). Lors de leur première réunion, les membres d’une commission élisent un vice-président qui, en cas d’absence ou d’empêchement du maire, convoque la commission et préside les séances.

2.4. Les groupes politiques

Dans les conseils municipaux des communes de plus de 100 000 habitants, des groupes d’élus peuvent se constituer par la remise au maire d’une déclaration, signée de leurs membres, accompagnée de la liste de ceux-ci et de leur représentant. Le conseil municipal peut alors affecter aux groupes d’élus un local administratif, du matériel de bureau et prendre en charge leurs frais de documentation, de courrier et de télécommunications. Le maire peut, dans les conditions fixées par le conseil municipal, affecter aux groupes d’élus une ou plusieurs personnes.

Le conseil municipal ouvre, sur un chapitre du budget communal spécialement créé à cet effet, les crédits nécessaires à ces dépenses, sans qu’ils puissent excéder 30 % du montant total des indemnités versées chaque année aux membres du conseil municipal. (CGCT, art. L. 2121-28).

Des collaborateurs de groupe peuvent être engagés par contrat à durée déterminée, d’une durée maximale de trois ans, renouvelable dans la limite du terme du mandat du conseil municipal. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans.